Chaque arbre compte

Dübendorf, St. Gallen und Thun, 05.03.2020 - Un hiver particulièrement chaud touche à sa fin – en été, la prochaine vague de chaleur menace. Le changement climatique ne fera qu’aggraver le phénomène. Peut-on créer en ville des zones de fraîcheur venant compenser cette réalité? Des chercheurs de l’Empa ont programmé un logiciel de simulation qui fournit des informations précises sur le type de revêtement et de végétalisation pouvant produire l’effet souhaité. A titre d’illustration, ils ont choisi la Münsterplatz de Zurich.

L'hiver le plus chaud depuis le début des relevés météorologiques touche à sa fin. La température moyenne était de 3,4 degrés Celsius plus élevée que la moyenne de 1981 à 2010, a rapporté le 4 mars le service européen du changement climatique Copernicus Climate Change Service (C3S).  Il est donc à craindre que les prochains mois d'été battent également de nouveaux records de température. Dans les villes, l'asphalte brillera, et traverser des lieux sans ombre comme le Münsterhof de Zurich sera une torture.

Comment faire pour que nos villes restent à peu près agréables à vivre dans les 100 prochaines années, alors que les températures ne cesseront d’augmenter? Un peu de verdure urbaine artistement répartie? Ou faut-il prendre des mesures plus précises? L’Empa propose une première modélisation informatique de l’approche à choisir, sur l’exemple justement de la Münsterplatz.

Aytaç Kubilay travaille au «Laboratory of Multiscale Studies in Building Physics» de l’Empa et à la chaire de physique du bâtiment de l'ETH Zurich. Il est expert en simulation des flux de chaleur à différentes échelles, des pores d’une tuile, d’un mur de béton ou de pièces de bois, jusqu’à une ville prise dans son ensemble. Avec ses collègues, il réfléchit aux stratégies propres à maintenir les villes supportables lors des futures canicules. Le chercheur a choisi pour modèle la Münsterplatz du cœur historique de Zurich. Elle est en grande partie pavée et séparée de l’église du Fraumünster par une bande de béton. Elle est en outre presque encerclée de bâtiments dont les façades sont chauffées par le rayonnement solaire.

Rendre le changement climatique plus supportable

La population a en quelque sorte plébiscité l’idée d’une Münsterplatz verdie. En témoigne l’accueil réservé l’été dernier à l’installation de l’artiste bernois Heinrich Gartentor: durant quatre semaines, la place s’est trouvée couverte d’une prairie sèche agrémentée de deux saules à l’ombrage bienfaisant, empruntés au Baummuseum de Rapperswil. De l’ouverture jusqu’au dernier jour, le 17 septembre, la ville a reçu demande sur demande de pérenniser cette prairie.

Kubilay et ses collègues de l’Empa étaient entièrement étrangers à l’action de Heinrich Gartentor, même si leurs travaux vont dans le même sens. Les chercheurs ont choisi cette place pour effectuer des simulations dont les résultats seraient transférables à d’autres lieux et d’autres villes. Leurs calculs montrent que la température de la Münsterplatz resterait sensiblement inférieure si, au lieu d’être pavée, la place était couverte de terre et d’herbe. Le sol se rafraîchirait mieux la nuit et accumulerait moins de chaleur le jour.

A quoi tient le sentiment de bien-être?

Pour évaluer l’effet sur les gens d’une modification de la température, les chercheurs de l’Empa utilisent l’indice universel du climat thermique (UTCI). Celui-ci évalue la température ressentie par les passants compte tenu non seulement de la température de l’air, mais également de son humidité, de la température avoisinante, du rayonnement solaire et de la vitesse du vent. L’UCTI reste assez semblable à l’échelle centigrade: les valeurs allant de +38 à +46 signalent un «stress thermique très fort», de +32 à +38 un «fort stress thermique», de +26 à +32 un «stress thermique moyen». Les gens se sentent le mieux et n’éprouvent aucun stress thermique pour un UCTI situé entre +9 et +26.

Résultat de la simulation: Dépaver un quart seulement de la Münsterplatz pour y poser un autre revêtement permettrait d’éviter la fournaise que cette place constitue en été. Un sol en briques poreuses permettrait un rafraîchissement par arrosage et évaporation. De l’herbe serait également bienvenue, même si elle n’était pas arrosée en permanence, même si elle devait parfois se dessécher. Les périodes durant lesquelles l’indice UTCI de la place dépasse 32 («fort stress thermique») seraient donc sensiblement réduites par des revêtements mieux adaptés.

Les arbres modifient le climat

Le résultat serait encore meilleur avec des arbres. Aytaç Kubilay et son collègue Lento Manickathan ont simulé l’effet de quatre arbres groupés au nord de la place. «Leur ombre et leur transpiration réduirait fortement la charge thermique», explique Kubilay. La température ressentie serait réduite de deux degrés sur de larges secteurs de la place, voire de quatre degrés là où les façades sont à l’ombre.

Les arbres ne font pas que rafraîchir la place, ils peuvent y modifier durablement l’écoulement du vent. Cet effet peut se combiner aux autres pour lutter contre les canicules. Après ces simulations au cœur de Zurich, les chercheurs vont maintenant affiner leur programme afin de permettre aux urbanistes de calculer plus en détail la manière d’affronter les changements climatiques.

Presence of trees creates a completely different climate

The result would be even clearer if trees were planted on Münsterplatz. Aytaç Kubilay and his colleague Lento ­Manickathan simulated with their software the effect of four narrow standing trees on the northeast side of the square. “The shade of the trees and at the same time their transpiration cooling would greatly reduce the heat stress,” says Kubilay. The perceived temperature would drop by two degrees on large parts of the square. Where the house facades are in the shade, it can even be up to four degrees.

The trees can help cool down the square, but also change the wind-flow field. After the model calculations at Münsterplatz, they want to further refine their simulation in order to enable city planners to make detailed predictions on how climate change can be tackled.


Adresse pour l'envoi de questions

Aytaç Kubilay
ETH Zurich, Chair of Building Physics
akubilay@ethz.ch

Viktor Dorer
Empa, Laboratory for Multiscale Studies in Building Physics
Tél +41 58 765 42 75
viktor.dorer@empa.ch



Auteur

Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherche
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